Publié le 09.11.2020 | Rédigé par Cécile Caitucoli | 14 minutes de lecture
L’expérience des camps de vacances d’hiver est inoubliable pour les enfants et les adolescents. Adulte, chacun se souvient de ce séjour en montagne avec les copains. Est-ce l’ambiance particulière des veillées ? Les émotions de la toute première glisse ? Essayons donc de comprendre d’où vient la magie des camps de neige en retraçant leur histoire.
Tout a commencé avec la première colonie de vacances à la fin du 19e siècle. Pour certains, son inventeur est le pasteur suisse Hermann Walter Bion, créateur de la Ferien-Kolonie en 1876. D’autres affirment que tout le mérite revient au pasteur Otto Steiger, fondateur de la colonie de vacances Suisse Allemande en 1875. Une chose est certaine, la Suisse en est le berceau. Ensuite, l’idée a essaimé dans tous les pays d’Europe au cours du 20e siècle. Le docteur Georg Varrentrapp donne ses recommandations aux organisateurs en 1882 :
« L’endroit (…) doit être à proximité des forêts et de la nature. Il doit offrir de la sécurité au point de vue des accidents et une bonne nourriture (…) La maison d’habitation sera dans une position salubre avec des chambres claires, grandes et gaies. »*
Ferien-Kolonie en 1876 (Appenzell)
Les premières colonies sont d’anciennes fermes ou des châteaux, réaménagés pour des questions de sécurité, en s’inspirant de l’architecture des chalets.
L’objectif est alors de guérir des enfants malades grâce à l’exercice au bon air pur, loin des agglomérations. À cette époque, la tuberculose sévit durement surtout dans les milieux peu aisés. De nombreux jeunes, issus de familles pauvres, découvrent le bord de mer et les balades en montagne pour la première fois.
Les journées, principalement financées par la charité publique, sont divisées entre excursions, activités sportives et instruction. Cette dimension sanitaire, sociale et pédagogique des séjours pour enfants s’est atténuée sans pour autant disparaître.
Les changements économiques et culturels – généralisation des congés payés, accès aux loisirs, etc. – vont mettre à mal les camps et colonies de vacances pendant la 2e moitié du 20e siècle. En effet, les vacances en famille deviennent plus accessibles. Au même moment, les sorties scolaires en montagne se développent car les sports de neige commencent à devenir populaires. On construit des infrastructures adaptées et des remontées mécaniques.
La station de ski de Praz-sur-Arly, en Haute-Savoie, affirme avoir accueilli la toute première classe de neige. En 1950, l’Éducation nationale aurait autorisé une école à emmener ses jeunes élèves à la montagne, sous la direction du Ministère de la Jeunesse et des Sports.
Ces classes de neige sont appelées des camps de ski en Suisse. Leur tradition remonterait à la fin de la 2e guerre mondiale. Depuis quelques années, l’expression « camps de sports d’hiver » est davantage utilisée. L’institution J+S (Jeunesse + Sports) en fait la promotion.
Indépendamment de ces différences lexicales et institutionnelles, le principe est le même partout. Pendant quelques jours, enseignants et élèves participent à des activités scolaires et sportives extra-muros dans un contexte dépaysant. Les bénéfices s’avèrent évidents et n’ont jamais été démentis plus de 60 ans après :
En fait, ces camps constituent d’abord une passionnante aventure. Quel que soit le cadre – colo, stages sportifs organisés par les écoles de ski, scoutisme, etc. – les enfants en reviennent grandis. Ils sont à la fois encadrés et responsabilisés dans un environnement où tout est propice aux découvertes.
Pour la majorité des gens, l’apprentissage du ski – chasse-neige, virages, etc. – est au cœur des camps de neige. En réalité, on voit apparaître une multitude de sports et de loisirs parfois plus insolites :
Contemplatifs, créatifs, ou casse-cous, tous peuvent s’initier à des sports de glisse et faire le plein d’émotions. Cependant, ce qui fait la magie d’un camp d’hiver, pour les jeunes, relève d’abord du partage et du dépaysement. Sa dimension inoubliable repose sur l’alchimie entre :
Ces évènements, vécus dans la bonne humeur, laissent forcément des souvenirs durables et lumineux. Les camps de vacances et classes de nature permettent de vivre autrement les loisirs, le sport, l’amitié et les voyages.
Le nombre de classes découvertes, sur des domaines skiables, diminue en Suisse, en France et dans tous les pays d’Europe, depuis de la fin des années 1990. La fréquentation des stations de ski, en particulier chez les jeunes, affiche une forte baisse.
En réalité, les camps d’hiver sont moins nombreux sous l’effet de différents facteurs :
D’ailleurs, en Suisse, l’arrêté du 7 décembre 2017, relatif aux contributions financières des parents, a fait polémique. Les professionnels de l’enseignement et du sport ont annoncé la disparition des excursions scolaires et la perte d’un bien culturel suisse.
On assiste toutefois à une volonté forte de promouvoir le camp de ski. L’association Initiative sports de neige Suisse, fondée par la championne de snowboard et médaillée d’or en boardercross Tanja Frieden, en est un exemple. Elle est à l’origine de la plateforme GoSnow. Cet outil facilite l’organisation de camps et journées de sports de neige à prix accessible pour les écoles.
Plongez dans la neige! GoSnow.ch from Schneesportinitiative Schweiz on Vimeo
En effet, les sports d’hiver sont considérés comme partie intégrante du patrimoine helvétique. De plus, les colonies de vacances restent un exemple positif d’éducation populaire, de vivre-ensemble et de mixité sociale. En France, les acteurs du tourisme hivernal déplorent donc également la disparition des classes de neige et colos en montagne.
Dans le même temps :
Des passionnés s’engagent donc toujours pour permettre à chaque enfant de découvrir les joies des sports d’hiver.
* Les colonies d’écoliers en vacances. Quatrième congrès international d’hygiène et de démographie à Genève (4-9 septembre 1882), t. 1. Genève : H. Georg libraire éditeur, 1883.
Par curiosité ou par nostalgie, ceux qui le souhaitent peuvent revoir cette "vidéo archive de la RTS".
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